Crédit: Hôpital Daloa, Côte Divoire : tests de laboratoire sur les fluides corporels pour établir la présence des parasites qui causent la maladie du sommeil.Credit: Universal Images Group via Getty Images

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La déclaration de Kigali sur les maladies tropicales négligées (MTN), lancée au Rwanda, vise à mobiliser la volonté politique et à obtenir des engagements pour lutter contre les MTN, afin d'atteindre les cibles fixées pour l'objectif de développement durable (ODD) 3 et la feuille de route de l'Organisation mondiale de la santé sur les MTN (2021-2030). Les MTN constituent un groupe diversifié de 20 maladies qui touchent 1,7 milliard de personnes, principalement dans les communautés démunies des zones tropicales, notamment en Afrique. Elles compromettent le développement précoce des enfants, la santé reproductive et sexuelle et la qualité de vie, ainsi que le développement économique.

Cette déclaration, qui constitue le plus grand partenariat public-privé au monde, est essentielle pour faire progresser le programme de santé et de développement dans les pays touchés et renforcer la sécurité sanitaire mondiale. Tant que les MTN continueront à peser sur les systèmes de santé nationaux, les contributions des pays à la surveillance et au contrôle mondiaux des agents pathogènes nouveaux et émergents seront compromises.

Les personnes touchées par les MTN ont déjà bénéficié de la déclaration de Londres de 2012 sur les MTN, un prédécesseur de la déclaration de Kigali qui a vu les partenaires mondiaux s'engager à contrôler, éliminer ou éradiquer 10 maladies d'ici 2020, améliorant ainsi la vie de plus d'un milliard de personnes, 46 pays ayant éliminé au moins une de ces maladies.

La voie à suivre pour la SNMT est pavée de bonnes intentions et d'optimisme. Mais nous devons faire plus, compte tenu du fait que la réponse mondiale au COVID-19 a perturbé les programmes de lutte contre les MTN dans 44 pays. En outre, le retrait de plus de 150 millions de livres sterling du financement des MTN par le Royaume-Uni, dans le cadre des réductions du budget d'aide de ce pays, a anéanti un tiers du financement des donateurs de MTN, affectant les traitements de 250 millions de personnes et au moins 180 000 opérations chirurgicales destinées à prévenir les handicaps.

L'appropriation et la prévention par les pays sont la clé de la résilience

Les pays africains doivent prendre certaines mesures pour renforcer la résilience des programmes de lutte contre les MTN. Une caractéristique importante de la déclaration de Kigali est l'appropriation par les pays endémiques du programme de lutte contre les MTN, sous l'impulsion du Rwanda et du Nigeria. L'appropriation locale permet aux pays touchés de gérer toutes les étapes du contrôle des MTN. Cela commence par l'augmentation du financement local des programmes de lutte pour assurer l'autosuffisance et l'investissement dans les structures de santé publique qui fonctionnent, comme la gestion de l'eau potable et l'assainissement. Dans le même temps, les pays doivent investir dans la recherche de solutions et d'innovations locales pour réduire le besoin de traitements. Le financement local garantira que les pays touchés déterminent les priorités de la recherche en fonction de leurs propres besoins.

Les MTN peuvent être considérées comme des maladies de personnes laissées pour compte. Les programmes actuels se concentrent de manière disproportionnée sur le traitement par les médicaments ou la chirurgie, plutôt que sur la prévention et la gestion des maladies seulement lorsque la prévention et le traitement ont échoué. Les personnes atteintes de défiguration ou de cécité liées aux MTN et causées par la lèpre, l'éléphantiasis, le pian, le trachome ou l'onchocercose sont les plus négligées de toutes, et les services de santé doivent mieux s'engager auprès d'elles. Les pays touchés doivent de toute urgence montrer la voie en investissant dans des innovations et des approches locales peu coûteuses et en les mettant en œuvre pour répondre aux besoins des patients. Seuls des forfaits de soins abordables et accessibles pour la prise en charge des cas feront une différence significative pour eux.

Le principal objectif de la déclaration est de faire en sorte que les personnes touchées par les MTN, en particulier les femmes et les filles, les personnes handicapées, les minorités et les groupes sous-représentés, soient au centre des programmes et des processus décisionnels relatifs aux MTN. C'est plus facile à dire qu'à faire, car très peu de pays ont actuellement des structures en place pour s'engager efficacement auprès de ces groupes. Nous avons récemment montré que le non-respect des règles d'utilisation des toilettes par les femmes africaines vivant en milieu rural était lié à leur besoin d'espaces sûrs à l'extérieur de la ferme. Cela souligne la nécessité de co-créer des solutions avec les communautés concernées. Le leadership local est essentiel pour mettre en place des interventions de lutte contre les MTN, acceptables et pertinentes au niveau local. La déclaration de Kigali a donné le coup d'envoi vers l'engagement inclusif de toutes les parties concernées.